Le franchiseur a toujours la volonté de protéger le savoir-faire qu’il a transmis, et notamment de son utilisation dévoyée par le franchisé qui le quitte : ainsi classiquement, il est inséré dans les contrats de franchise une clause de non-concurrence post-contractuelle, qui vise à limiter l’exercice par le franchisé d’une activité similaire à celle du réseau dont il se sépare.
Pour être valable, une telle clause doit être justifiée par la protection des intérêts légitimes du franchiseur et ne pas porter une atteinte excessive à la liberté d’entreprendre du franchisé, c’est-à dire être limitée quant à l’activité, l’espace et le lieu qu’elle vise.
Toutefois la jurisprudence a récemment considéré que bien que limitée à l’activité exercée, dans le temps et l’espace, la clause de non concurrence imposée au franchisé n’était pas valide, et a prononcé sa nullité.
Dans cette affaire, une société avait conclu avec la société Distribution Casino France un contrat de franchise sous enseigne SPAR. En cours d’exécution du contrat, le franchisé a informé son franchiseur de sa volonté de céder son fonds de commerce et lui a notifié, peu de temps après, la résiliation de son contrat, se plaignant du logiciel informatique et de l’installation de plusieurs enseignes du groupe, dans sa zone de chalandise. La société Casino, considérant que les griefs invoqués par le franchisé demeuraient de faux prétextes pour quitter le réseau au profit d’une enseigne concurrente, a contesté la régularité de la rupture du contrat de franchise devant les juges.
Le franchisé a soulevé la nullité de la clause de non-concurrence figurant dans son contrat, et rédigée de la manière suivante : « le franchisé s’interdit d’exploiter ou de participer d’une quelconque manière, directement ou par personnes interposées, à l’exploitation, la gestion, l’administration, le contrôle d’un fonds de commerce ou d’une entreprise ayant une activité identique ou similaire (…). Cette interdiction sera valable pendant un an à compter de la date de cessation du présent contrat pour quelque cause que ce soit, et ce dans un rayon de 30 kms du magasin exploité dans le cas d’une zone dite rurale et dans un rayon de 10 kms dans une zone urbaine ».
Si la zone de non-concurrence est bien circonscrite dans l’espace et n’est pas étendue à l’ensemble du territoire français, la Cour d’appel la juge néanmoins disproportionnée, considérant que l’interdiction d’exercer une activité identique dans les seuls locaux s’avérait suffisante pour éviter tout risque de confusion entre enseignes. Elle remet en question l’intérêt légitime allégué du Franchiseur, lequel cherchait en réalité à empêcher la concurrence d’accéder au territoire conquis. L’appréciation sévère des juges invite ainsi les rédacteurs à la plus grande prudence, dès lors que la moindre faille peut être exploitée pour obtenir la nullité de la clause et ainsi profiter à une enseigne concurrente.
Le franchiseur aura dès lors intérêt à limiter la clause de non concurrence, « aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée du contrat », selon les principes de l’article L 341-2 du code de commerce, le franchisé ne pouvant en conséquence avant le délai d’un an, s’affilier à un réseau concurrent.
Cour d’appel de Paris, 3 octobre 2018, n°16/05817
Par :
Me Fanny ROY
PIOT-MOUNY & ROY Avocats
fanny.roy@piotroyavocats.com
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